Désigner des individus par le vocable de « salaud » c’est évoquer une certaine attitude : Sartre, qui en a fait un véritable concept philosophique, a dit que « le salaud, c’est celui qui fait passer sa liberté avant celle des autres ». Le petit enfant dit « Moi d’abord, et ensuite, toi » : faut-il donc dire que cette conduite vient de la petite enfance, et qu’en conséquence c’est à l’éducation qu’il convient de prendre en charge ce mépris des autres ? Rappelons-nous : ce sont des jeunes gens, on les a appelés des blousons noirs, des hooligans, des black-blocks : chez eux, la société qui devrait développer la sympathie entre les hommes ne sert qu’à cultiver la haine des autres, et leur jeunesse ne fait qu’aggraver leur cas : seraient-ils ces « sauvageons » chez qui les tendances "naturelles" à la violence n’ont pas été combattues par une éducation restrictive, qu’on appelle la discipline, et qui impose le respect des valeurs sociales par un dressage de l’humain ? Il est facile pourtant de récuser ce constat : d’abord des salauds il y en a à tous les âges. Certains se demandent même s’il ne s’agirait pas là de l’état originel de certains. Et puis les diplômes ne changent rien : on dirait même que la culture affine les capacités de nuisances. Pourtant les pays dictatoriaux le montrent c’est en prenant le contrôle des enfants que l’on dresse le plus facilement les êtres humains : selon quelles valeurs faudrait-il orienter une éducation pour qu’elle freine le mépris des autres ? A supposer que ce soit possible, il faut alors noter, comme le fait Kant, qu’il y a un âge pour apprendre la discipline - passé celui-ci on reste fixé dans cet état qu’on appelle l’âge des sauvageons.
Vendredi 17 janvier Médiathèque Jean Falala à Reims de 18 à 20 heures
Avec Didier Martz et Jean-Pierre Hamel, philosophes