La mortalité routière en France avait déjà connu une augmentation de 3,5% en 2014 par rapport à 2013. La tendance semble se confirmer en 2015 : 2 253 personnes sont mortes sur les huit premiers mois de l’année, soit 99 morts de plus que sur la même période de l’année précédente. Les nombres d’accidents corporels, de blessés et de blessés hospitalisés sont eux aussi en hausse sur cette période.
L'accident, dit le dictionnaire, est un évènements fortuit, sans motif apparent, qui affecte une ou des personnes, en interrompant le déroulement normal, probable et attendu des choses. Ici, il se déroule sur la route, une voie de communication qui permet la circulation de véhicules entre deux points géographiques donnés, généralement deux agglomérations. Il pourrait aussi se dérouler dans une rue. La route est un lieu neutre, une scène sur laquelle se déroule des évènements, des accidents qui apparaissent comme imprévisibles et improbables. On accuse alors, nous dit Alain, la fatalité, comme si l'événement était un défi aux lois du probable : « par exemple une voiture au passage à niveau juste en même temps que le train. »
L'accident en philosophie est secondaire par rapport à la substance même des choses. Il ne l'affecte pas dans sa réalité. La forme d'un lavabo, sa couleur n'affecte pas son essence formée de trois attributs essentiels : alimentation, évacuation, forme creuse.
Pour Thibaut Schepman, le mot « accident » fait passer les collisions de la route pour des événements malheureux dont personne n’est responsable. Comme le terme « vitesse » d'ailleurs lorsqu'on dit « la vitesse tue ». Une voiture rencontre un train, « une femme meurt de ses blessures après qu’une voiture est montée sur le trottoir” ou “une voiture hors de contrôle fauche un passant sur un trottoir ». C’est comme si personne ne conduisait ces voitures et que nous avions affaire à des engins autonomes, des engins tueurs livrés à eux-mêmes. Et que si quelqu'un se trouve sur leur passage, c'est la faute à « pas de chance ». Il arrive même, à leur corps défendant, que ces engins soient agressés par d'autres engins comme dans le cas de cette femme enceinte qui précipita son vélo contre une voiture !
Le journal titre « accident de vélo mortel » alors qu'il faut aller dans l'article pour découvrir qu'un chauffeur se trouvait dans la voiture et était responsable. Il serait sans doute mal venu de titrer qu'un chauffard renverse un cycliste. On mentionne d'ailleurs dans le même article que la voiture est restée sur les lieux (on suppose que le chauffeur est resté avec!) comme s'il était difficile de dire qu'une personne était impliquée.
Des associations américaines invitent à rechercher des alternatives au terme accident qui sous-entend une forme de malchance ou de fatalité, alors que la quasi-totalité des « accidents » sont dus à une faute de comportement. Exercice difficile car il faudrait alors parler non plus d'accident mais d'homicide ou de blessures involontaires. Et si l'on dit homicide, il faut alors que la voiture soit l'arme du crime. Mais comment concilier cette image redoutable avec celle de la voiture « faite de la matière de nos rêves » (pub pour Giulietta), qui « ravive la flamme du désir » (pub pour la Renault Clio) ou encore qui promet une autre vie (sic) ? Ainsi va le monde !